
Si la station balnéaire de Hua Hin, à trois heures de route ou de train au sud de Bangkok, est une destination très populaire pour les touristes thaïlandais, la tranquille cité a du mal à faire le plein auprès des touristes internationaux. Manque d’événements attractifs, une image un peu vieillotte et l’absence d’un véritable aéroport international expliquent cette relative désaffection. Mais le gouvernement et les acteurs locaux du tourisme veulent y remédier.
Hua Hin au bord du Golfe de Siam, à 170 km au sud de Bangkok, a longtemps été la station balnéaire la plus populaire du Royaume. Une popularité due à la présence de la famille royale mais aussi à l’une des premières lignes ferroviaires ouvertes en Thaïlande, qui a donné un accès facile depuis Bangkok. Certes, Hua Hin a préservé son attrait mais la station balnéaire, a, au fil des années, cédé la place à Pattaya dans l’esprit des voyageurs internationaux.
Destination de niche pour les étrangers
Certes, les chiffres de fréquentation de Hua Hin sont impressionnants. En 2023, la province de Prachuap Kiri Khan – où se situe Hua Hin – a accueilli 11,14 millions de visiteurs dont 5,58 millions de touristes, soit des hausses respectives de 17,7% et 14,6%. Mais sur ces 11 millions de visiteurs, seuls 488’000 étaient étrangers. Par comparaison, la province de Chonburi, où se situe Pattaya, a accueilli la même année 23,26 millions de visiteurs. Dont 15,45 millions d’étrangers!
En 2023, la province de Prachuap Khiri Khan a néanmoins généré 44,24 milliards de bahts (1,15 milliard de francs) de recettes touristiques, dont plus de 70 % provenaient de Hua Hin.
A l’ombre de la méga-cité resort, réputée pour sa vie nocturne, Hua Hin s’adresse donc à une clientèle de niche. «Hua Hin reste bien entendu une destination majeure pour les classes moyennes et supérieures thaïes. Elles aiment la tranquillité de la cité, notamment par rapport à Pattaya. A l’international, on accueille essentiellement des visiteurs européens d’âge mur ainsi que des familles. Là aussi, le côté relaxant de Hua Hin est un atout», explique Srayut Ekahitanonda, propriétaire et directeur général du très joli Loligo Resort à Hua Hin.
Deux propriétés, une philosophie

Ses deux propriétés, l’une à côté de l’autre, reflètent parfaitement la philosophie de la station balnéaire: le Loligo resort, un quatre étoiles doté de 47 chambres et suites; le second, Let’s Sea, est un quatre étoiles luxe, avec 40 suites. La moitié donne accès à une piscine intérieure par le biais d’une jetée privée, l’autre moitié comporte un ‘rooftop’ agrémenté d’une gigantesque baignoire de plein air. Deux restaurants -dont une des meilleures tables de fruits de mer et poissons en ville, le Let’s Sea Hua Hin’s Beach Restaurant, plusieurs bars et deux espaces spa complètent les installations. «Nos deux resorts reçoivent surtout de jeunes couples en lune de miel, des familles ou des couples plus âgés- la plupart européens. Ainsi que des touristes asiatiques individuels», explique Srayut Ekahitanonda.
L’hôtel a également une vraie démarche écologique, correspond bien aux attentes des touristes séjournant à Hua Hin. Les préoccupations écologiques ont été intégrées lors de la construction des deux établissements, avec une architecture économe en énergie, l’utilisation de matériaux naturels ainsi que des restaurants et bars qui tirent pleinement parti de la lumière naturelle et de la fraîcheur apportée par la mer.
«De plus, nous travaillons avec des fermiers locaux pour réduire l’impact carbone des transports et pour leur assurer un revenu décent. Nous avons une stricte gestion des déchets. Nous avons ainsi obtenu la certification environnementale ISO14001», décrit Srayut Ekahitanonda.
Ce dernier est fier de ce que représente Hua Hin en tant que destination. «On a un environnement relativement contrôlé, une nature abondante, des plages bien entretenues et de nombreuses attractions: monuments historiques, une bonne offre shopping, des parcours de golf, la possibilité de faire du cheval, d’apprendre à pêcher, de pratiquer de nombreux sports aquatiques», raconte Srayut Ekahitanonda.
De plus, le doublement de la ligne ferroviaire entre la ville et Bangkok a permis de réduire – un peu – le temps de voyage. Il faut tout juste 3 heures de train pour rejoindre Hua Hin depuis 2022. Avant, on comptait plutôt sur un temps de parcours supérieur à 3h30.
Retravailler l’image de Hua Hin
Et pourtant, selon son opinion, il manque à Hua Hin le petit quelque chose qui permettrait à la cité balnéaire d’attirer plus de visiteurs internationaux. «Je pense que le Festival international de jazz a souffert des années Covid et qu’il aurait certainement besoin d’être repensé pour en faire de nouveau un évènement international majeur. En général, je pense que quelques grands évènements comme des festivals manquent à notre ville pour lui apporter une meilleure notoriété », regrette le CEO de Loligo Resort.
Il n’est pas le seul à penser que Hua Hin devrait se redéfinir. La municipalité de Hua Hin a en fait peu de pouvoirs pour agir sur les infrastructures de la cité. Dans le cadre de son statut actuel de municipalité, Hua Hin dépend en fait fortement du bon vouloir du gouvernement central pour son budget et pour l’approbation de projets, y compris dans sa politique touristique.
La municipalité souhaiterait ainsi que son cadre juridique change et qu’elle devienne une ‘ville administrative spéciale’ calquée sur le modèle de Pattaya, qui bénéficie d’une grande autonomie de décision. Ce statut permettrait une meilleure gestion des transports publics, des déchets ou encore de l’éclairage public. Il permettrait aussi de mettre en valeur plages et attractions.
Il permettrait aussi de positionner Hua Hin comme un centre mondial pour le tourisme de bien-être et de spa. La présence du Chiva-Som International Health Resort à Hua Hin a permis de positionner la cité balnéaire à l’international. Les 57 pavillons privés que comprend ce luxueux spa accueille toute l’année la jetset mondiale. Sauf que Hua Hin ne capitalise pas tant que ça sur cette fabuleuse publicité.
Même constat avec le spa Barai du Hyatt Regency Hua Hin, le Devarana Wellness au Dusit Thani ou encore le Cenvaree Hua Hin dans le très bel hôtel de style colonial Centara Grand Beach Resort & Villas Hua Hin. Ils sont également primés et réputés pour leur qualité. Mais ne sont pas des buts de voyage en eux-mêmes pour les visiteurs étrangers. Début décembre, la municipalité et des experts du tourisme ont discuté la possibilité de faire de Hua Hin le centre des spas de mer.
Un aéroport de nouveau international en 2025?
Le gouvernement quant à lui souhaite accorder à l’aéroport de Hua Hin un statut de plateforme internationale. L’aéroport de la ville n’accueille pour l’instant qu’un vol quotidien sur Chiang Mai par Air Asia. Le ministère des transports thaïlandais pense que le statut international pourra être accordé dès l’année prochaine avec l’installation de services d’immigration et de douanes. Le tarmac devra être rénové, la piste allongée de 45 mètres pour y accueillir des Boeing 737 et des Airbus A320 en pleine charge.
Les travaux ont déjà été entamés et devraient se conclure d’ici le début 2026 avec le renouvellement des installations électriques. Cependant, les autorités estiment que l’aéroport pourrait accueillir de nouveau des liaisons internationales dès la fin 2025. Elles espèrent ainsi un retour de la ligne d’Air Asia sur Kuala Lumpur et de la potentielle ouverture d’une liaison sur Singapour.
Hua Hin est donc en passe de retrouver son statut de destination touristique de classe mondiale. Ce que la ville était lors de l’ouverture du chemin de fer vers Bangkok en 1911…
Luc Citrinot, Bangkok








